Hume, David (1711-1776)
Hume, David (1711-1776)
Hume conjugue un empirisme critique et un scepticisme mesuré. Cela le conduit à se défier de toutes les constructions métaphysiques et théologiques qui s’affranchissent arbitrairement des limites de l’expérience. Il met en cause au passage les visions pessimistes de la nature humaine qui font considérer que, sans la peur d’un Dieu providentiel qui punit et qui récompense, l’homme agirait forcément mal.
Le philosophe imagine un discours tenu par Epicure aux Athéniens. En réalité, c’est le dogmatisme finaliste de la Providence chrétienne qui est ainsi visé. Il s’agit de montrer que les hypothèses concernant l’ordonnancement finaliste du monde disent plus que ce qui peut être logiquement tiré de son observation objective. Elles ne sont ni fausses ni vraies, et la sagesse commande de s’en tenir à l’idée qu’elles sont de l’ordre de la conjecture indémontrable. L’agnosticisme métaphysique et théologique est ici explicite. Quant à la moralité, elle ne requiert nullement que ce type de question soit tranché. Hume considère qu’elle découle d’une disposition naturelle à l’être humain, à la fois sentiment et sociabilité spontanée. Epicure lui-même, s’il récusa le finalisme providentialiste et toute intervention divine dans les affaires humaines, tout en faisant du plaisir le principe et la fin de toute action maîtrisée, n’en fut pas moins le plus vertueux des hommes.
Chez Hume, la distinction de la croyance et de la connaissance certaine se radicalise et s’ancre dans une enquête sur la consistance et le fonctionnement de l’esprit humain. Elle aboutit à interroger les certitudes les mieux établies, depuis les croyances ordinaires fondées sur des habitudes et des associations répétées, alors qu’elles se vivent dans l’illusion d’atteindre la réalité objective, jusqu’aux doctrines métaphysiques et religieuses, qui croient pouvoir statuer sur ce qui dépasse les limites de l’expérience humaine alors qu’elles ne font que convertir de façon illicite de simples hypothèses en constructions dogmatiques. Si l’on déclare inconnaissable (en grec agnostos) tout ce qui dépasse les limites de l’expérience humaine, les croyances religieuses doivent s’assumer explicitement comme portant sur ce qui est possible, non sur ce qui est absolument certain. Et ce quelles que soient l’intensité de la foi, son absence de recul.
La prudence intellectuelle ainsi manifestée est gage de tolérance en matière métaphysique et théologique, puisqu’elle s’en prend à l’absence de distance critique des dogmatismes et invite à pratiquer un doute qui constitue une véritable prévention contre le comportement fanatique, généralement enraciné dans la certitude absolue d’avoir raison. D’où la nécessité de laisser à chacun « la liberté de conjecturer et d’argumenter ».
Dictionnaire amoureux de la Laïcité